lundi 26 mars 2018

2017 : Cimes et Abysses

L'année 2017, l'année de mes 42 ans, a été pour moi une période charnière, entre des années de travail dans l'informatique en tant qu'administrateur système, et un avenir que je ne connaît pas encore.

Mais si toutes les périodes de transitions ne sont pas douloureuses, ça n'a pas été le cas de ce que j'ai vécu. Vraiment pas.

Aujourd'hui je considère que cette année s'est divisée en quatre périodes, comme quatre saisons :

- une fin d'hiver au cours de laquelle j'ai travaillé chez un client final, anéantit de crises d'angoisses au point que je n'en pouvais plus,


- un printemps en arrêt thérapeutique fait de burnout et d'envie de suicide, durant mon arrêt de travail, qui s'est terminé avec l'annonce de mon licenciement,


- un été de préavis de licenciement et de chômage, au cours du quelle j'ai été un peu mieux, et où je n'ai malheureusement pas été aussi actif que je l'aurais voulu,

- et pour finir un automne très actif en terme d'activité associative, de vie sociale, et de vie professionnelle puisque j'ai même entamé une nouvelle formation.


Hiver


J'ai entamé le début de l'année alors que j'étais toujours empêtré dans des crises d'angoisses liées à mon boulot, où les conneries allaient de la réparation des imprimantes à des problèmes au niveau de l'administration Office 365, notamment la création de mail Outlook et l'adhérence avec l'AD.

Pourtant, j'aurais pu reprendre confiance en moi, puisque j'avais quand même une bonne connaissance du SI de ce client, qui me permettait d'alerter lorsqu'ils voulaient faire des évolutions.


Mais en même temps, j'étais tellement englué dans des problèmes quotidiens, l'angoisse de savoir que je parviendrais pas à résoudre le problème de l'AD, l'équipe de mon ESN ne m'apportant pas l'aide dont j'avais besoin, et en plus j'avais été transféré dans un bureau nul avec de la moquette, et de surcroît j'étais quand même victime de gaslighting de la part de mon N+1, qu'en définitive je n'ai pas tenu, et un matin j'ai quitté les locaux du client pour ne plus jamais y revenir.

Printemps


Il a été question d'un mi-temps thérapeutique, solution suggérée par la médecine du travail, mais cela ne s'est jamais fait.

Le mois de février a été particulièrement difficile.

J'étais arrivé au bout de mon système de croyance, qui affirmait que tout est possible à condition d'être méthodique, que l'on pouvait tout organiser, tout apprendre. Auparavant j'aurais considéré avec mépris que la dépression et le burnout n'étaient que des symptômes de faiblesses de l'esprit ; je ne pouvais plus affirmer de tels convictions (et ne le pourrait par ailleurs jamais plus).

Mes certitudes s'étaient écroulées. Même la marche du monde ne me paraissait plus digne d'intérêt : le changer, pourquoi ? Après tout je n'étais qu'une particule dans un chaos absurde, et tout compte fait, la seule chose que je pouvais faire pour rendre ce monde meilleur, c'était de ne plus en faire partie. L'un des seuls moment d'illumination au cours de ce printemps de cauchemar fût lorsque je découvris que je pouvais me tuer - j'en ai presque retrouvé le sourire.

Mes crises d'angoisses étaient violentes. Je ne sais plus ce qui a pu me faire tenir et m'empêcher d'opter pour une solution définitive, mais je doute que ç'ait été les anti-dépresseurs que je prenais à ce moment ; peut-être plus les séance avec ma psychothérapeute.

Eté


Mon moral s'est amélioré après l'annonce de mon licenciement. Pendant mon préavis et durant la première partie de mon chômage, j'ai voulu être actif, et je crains de ne pas l'avoir été autant que j'aurais pu l'être, notamment en matière d'activité associative et d'écriture.

J'ai envisagé une reconversion au point d'abandonner complètement l'informatique. Les ateliers de Pôle Emploi m'ont malheureusement convaincu qu'il n'y avait que dans ce domaine que je pouvais trouver un poste pouvant me satisfaire financièrement. Au départ j'ai voulu me tourner vers l'assistance à maîtrise d'ouvrage, et finalement un ami m'a convaincu de m'orienter vers la sécurité informatique.

Automne


A partir du mois de septembre, au cours d'un superbe automne, durant lequel nous pouvions nous promener en tee-shirt jusqu'à la mi-octobre, j'ai été nettement plus actif : cela a commencé avec le voyage au Canada, à Montréal pour le mariage d'un couple d'amis. Il m'a été très dur de vaincre mes angoisses en rapport avec les démarches administratives dans les aéroports, mais en fin de compte cela m'a permis de reprendre confiance en moi sur mes capacités à gérer des projets. D'ailleurs, je crois que je n'ai même pas pris de Xanax durant tout mon séjour.

Avant ce séjour, je n'avais pas vraiment profité de mon chômage pour prendre part à des activités associative, à part deux soirées que j'ai passé à La Paillasse, au début de l'année (un jeudi où j'ai rencontré le créateur de Nomade des Mers, et de voir son installation de production de spiruline, et un autre soir où se tenait une conférence sur l'IA et le monde médical).

J'ai été nettement plus actif après mon séjour à Montréal.

L'activité qui m'a fait vraiment le plus grand bien à été la participation à l'organisation du MMMFest : je crois que c'est durant ce festival que je me suis remis à croire que je pouvais apporter quelque chose au monde et aux gens que je rencontrais, et c'est à la suite de cela que mes crises d'angoisses ont vraiment disparues.

Parmi mes autres activités, je suis allé quelquefois au Grands Voisins, le squat situé dans l'ancien Hôpital Saint-Vincent de Paul, pour assister à des réunion avec Assemblée Virtuelle, j'ai assisté à une convention de fantastique, avec maison d'édition, jeux, conférence sur le jeu de rôle et cosplay, où j'ai trouvé une hématite pour remplacer le quartz que m'avait offert une ex et que j'avais perdu en allant chez ma psy, une autre conférence du Mouton Numérique sur le coût écologique d'internet et des datacenters et je suis quand même sorti dans des bars à de multiples reprises.

Enfin, cette année s'est achevée avec le début de ma formation en sécurité informatique. Il y a autant de technique que d'enseignement théorique dans ces cours, ce qui fait que je me suis enfin mis sérieusement au développement Python, et je me suis aperçu que les aspects législatifs et juridiques de la sécurité informatique m'intéressaient. De plus, je me suis aperçu qu'au sein de ma classe j'étais respecté.

Au cours de cette formation j'en ai profité pour refaire mon CV (le réinventer serait un terme plus exacte), de sorte que nombreuses furent les Entreprises de Services Numériques qui m'ont proposés des entretiens d'embauche - je les aient toutes acceptés, en enchaînant quelquefois plusieurs soir par semaine, afin de m'entraîner à parler de mon parcours. Si les débuts furent difficiles, m'être imposé cette contrainte a été payant puisque je suis maintenant nettement plus à l'aise.

La suite


Comme j'ai pu le constater, quelqu'un m'ayant connu avant cette année 2017 de cauchemar, et me retrouvant après n'aurait sans doute pas l'impression d'être en face de la même personne.

Reste à savoir ce que ce nouvel être que j'ai été contraint d'inventer pour survivre dans les moments les plus difficiles sera capable de faire.













mardi 6 février 2018

Suite à une lettre de Xavier Coadic : une réponse

Au cours du mois de janvier, Xavier Coadic, explorateur des possibles ayant consacré son énergie dans les fablabs, les hackerspace et autre tiers lieux d'où surgiront, j'en suis sûr, nos futurs, m'a écrit une lettre ouverte, que j'ai lu avec intérêt. Je penses que nous nous interrogeons tous deux sur notre futur ; il me semble que lui est plus impliqué dans les nouvelles formes d'expressions des organisations possibles que je ne le suis, puisque je ne les aient parcourus qu'avec le temps que me laissaient mes démons ou les contraintes pour le faire, tandis que je cherche à exprimer l'essence de ce que seront nos futurs non en le faisant, mais en m'interrogeant et en cherchant à écrire un roman en rapport avec ces derniers. D'ailleurs, peut-être mon approche est-elle vouée à l'échec ; peut-être que pour changer, le monde à plus besoin de gens s'impliquant à leur niveau, au quotidien, que de personnes rêvant ce futur et n'en faisant que la description.

Les questions qu'il posait dans sa lettre étaient intéressantes, voici mes réponses :

 Société ouverte, une réponse

Bonsoir, j'ai lu avec intérêt ta lettre, ou tu fais la description de l'année 2018 telle que tu crains qu'elle pourrait se passer. Une sorte de cauchemar (ou de rêve, c'est selon) néo-libéraliste, faisant la part belle aux métiers ubérisés, où des pans entiers de l'éducation seraient confiés à des Grands Groupes tels Google ou Microsoft, où même les activités associatives s'efforçant de garder leur indépendance face à ce pouvoir sans visage ne pourraient pas faire autre chose que s'allier aux Grand Groupe en question, parce que tout compte fait, leurs outils, pour organiser leurs luttes, sont tellement plus pratiques...

Tu dresses le constat d'une société inhumaine - à nos yeux tout du moins - où chaque chose serait à sa place, et une place pour chaque chose... une pyramide où les GAFAM seraient rois, et je ne peux pas te contredire, tandis que ce valet du pouvoir en place, un président quelconque que je ne nommerais pas, comme il l'a montré encore récemment, s'en irait détruire ce qui resterait de nos institutions et de notre solidarité sociale, cet ancêtre de ce que nous appelons désormais les Communs.

Et pourtant... pourtant je ne pense pas que ce serait un dystopie. Ces corps et ces âmes d'humains livrés à un monde à un monde si terne, seraient-il malheureux ? Et bien, je ne le pense pas. Ils auront leurs places dans la Machine, n'envisageront jamais de se rebeller contre ces sociétés qu'ils connaissent depuis leurs enfances, et qui leur ont apportés tant. Avoir un compte Google, c'est tellement pratique, et tant pis s'ils lisent nos données, qui suis-je, après-tout ?

Non, je penses qu'il seront heureux dans cette société consumériste dont les paramètres auront été choisis par des algorithmes de deep learning soigneusement choisis. Ils seront heureux ; personnes à moins d'être malhonnêtes, ne pourra affirmer le contraire. Mais seront-ils encore humain ? Malheureusement je crains que cette question ne saurait être posé dans leur monde, puisqu'un algorithme quelconque pourrait la considérer comme non pertinente.

Alors, serais-ce la fin ?

J'en doute.

Parce que le Cloud, la Technostructure de la Machine, ne se nourries pas que de données. Pour chaque enregistrement inséré dans la Base de Données qui prétend contenir le Monde, il est nécessaire de dépenser de l'énergie. Pour chaque mails envoyé, pour chaque transaction, pour chaque FAV, LIKE, RT, FOLLLOW aussi.

Or, l'énergie n'est pas infinie. Le pétrole touche à sa fin, et ce ne sont pas les gaz de schistes qui viendront apporter une solution durable à ce problème que personne, dans le département Economique de la Machine, ne semble s'être posé. Certes, les panneaux solaires chinois sont de plus en plus perfomants, mais cela permettra-il d'alimenter dignement les besoins en Cloud de la Machine ?

Pour ma part, je ne le pense pas. J'envisage donc une catastrophe, à plus ou moins brève échéance.

Heureusement la Machine, cette superstructure dont j'ai entrevue déjà le nom dans un journal aujourd'hui disparu dans les années 90, comme étant GLOBAL TECH, le dernier avatar de ce qu'on appelais Capitalisme à l'époque, n'est pas infaillible.

 Des élèves qui, dans les classes, penchés sur leurs tablettes, se demandent vraiment si Google ou Microstoft est la meilleure des solutions. Qui s'interrogent ; qui se posent des questions.

Elle est là, l'humanité, et étrangement, elle le sera toujours, lorsqu'un adulte dira "connecte-toi à ton compte pour me transférer ton agenda pour que je connaisse ton emploi tu temps", et que l'enfant (ou l'adolescent) répondra, avec tout la stupidité (ou le génie effronté) de son âge : "Non".

Et j'en suis certain, avant même que le monde s'écroule faute d'énergie à dépenser, ils nous rejoindrons. Ils ne nous ressembleront pas, ils ne seront pas tels que nous les aurions imaginés, guerriers fantasmés d'une luttes dont nous ne verrions que les aurores, et non les crépuscules, parce que peut-être, nous ne pourrions pas en faire partie, mais je suis sûr d'une chose : ils nous étonnerons, et, tout bien réfléchis (à ce moment-là il ne faut pas oublier que nous serons des vieux cons), ils nous étonnerons. Et alors, peut-être avec réticence, nous leurs donneront les clés de notre savoir que nous aurons sauvegardés, en conscience, sur des Clé USB sacrée ou sur Framapad parce que c'était l'ultime survivant des idées que nous avions alors. Que feront-ils de ce savoir ? Diront-ils "Ces vieux cons n'ont rien compris, ce n'est pas assez radical, effaçons tout ça pour créer notre propre monde" ? En feront-il des sortes de textes sacrées (sort que personnellement je réprouverais : je veux que mes textes soient triturés, critiqués, mis en morceau, pour peu que la réflexion qui en soit soit issue soit féconde) ?

 L'Energie n'aura qu'un temps. Ceux qui auront vécu heureux dans la Machine, lorsque celle-ci s'arrêtera faute de pétrole ou d'énergie solaire, nous rejoindrons. Ils se lamenteront de ne plus être connecté au Réseau, d'être dans le noir, de ne plus être dans leurs univers virtuelles. Et oui, ils nous haïrons, nous qui les auront accueillis, leurs donnant des tâches simples, travailler à la Fablab, rétablir le lien laser avec la communauté qui se trouve à 3 km d'ici et qui est indispensable au Réseau Parallèle que nous avons mis en place depuis si longtemps.

 Ils nous hairont. Pendant quelques mois. Et puis, la plupart se rendront compte qu'ils peuvent encore communiquer avec leurs Vraie Amies des Réseaux Sociaux, simplement plus lentement.

Sébastien, qui s'occupe de la Forge, qui se lamentait de ne plus plus pouvoir communiquer avec ses interfaces compliquées à Jonanna, qui habite au Canada et qu'il ne verra sans doute jamais à moins que lui ou elle n'entame le voyage en dirigeable pour se rejoindre, m'a confié qu'il avait retrouvé sa trace dans les Réseaux parallèle que nous avons mis en place depuis des années, et qu'il avait entamé une correspondance épistolaire avec elle. En attendant, il a encore appris, à l'aide des anciennes archives, à fabriquer l'acier le plus pur qui soit pour les couteaux et les scies qui nous seront utiles pour couper une partie de la forêt qui nous est nécessaire pour passer l'hiver. On pourrait penser que ce n'est pas nécessaire parce que ce n'est que du temps gagné à une tâche qui devait être fait. Je m'inscrit en faux, parce que ce temps que nous avons épargnés, je l'ai utilisé à contacter d'anciens amis à travers le Réseau, si lent, désormais, pour leur faire parce que de mon expérience, et puis, il y a aussi aussi tous ces moments d'oisiveté gagnés, à écouter Mireille raconter ses rêves, et Gyslain qui se plaint tout le temps en parlant de l'ancien temps où c'était plus facile, mais en général nous finissons notre discussion par de grands éclats de rire, parce que finalement, en fait, nous savons que nous sommes vraiment heureux, en tant qu'humains, non comme ceux qui ont pu nous précéder, dans cette société étrange où même la notion de donnée avait une valeur.

Non, ils n'ont pas autant de puissance, pas autant de possibilités que dans l'ancien monde ; tous ceux que nous avons recueillis l'attestent et en témoignent souvent. Mais j'aime à me dire qu'ils ne sont pas moins heureux qu'en ces temps.

* * *

Les questions de Xavier Coadic dans sa lettre ouverte apportaient des réponses directes, et arrivé à ce point je me dois de dire que je n'y ai pas répondu. C'est que l'exercice était difficile ; je ne savais pas vers quelles directions elles allaient me mener, et après avoir tenté d'élaborer une réponse structuré et pleine de philosophie j'ai préféré suivre ce qui me tiens lieu de coeur ou d'émotion (jeter la rationalité et hop j'écris et puis on n'en a rien a foutre au moins ce sera authentique hein).

Ma réponse était spontanée, et son extrapolation va peut-être un peu loin ; je ne penses pas que l'humanité sombrera dans de tels abimes : il y aura toujours un Réseau (le truc, Internet (par truc j'entends "la structure technique et les gens qui le maintiennent" a été spécifiquement conçu pour résister à une guerre nucléaire VA survivre, même s'il ne nous permettra pas d'avoir du streaming de vidéo et que ça ressemblera peut-être plus à des forums et des blogs auto-hébérgés). Pour ce qui concerne l'énergie, nous pourrons nous en sortir, grâce au solaire, même si ce sera plutôt bizarre d'aller à la fablab du coin pour imprimer une pièce mécanique à base de plastique issue de sucre de blé cueillie dans le champ du coin.

Xavier, tu m'a demandé si une société telle que tu la craignais pouvais supporter une ouverture bases sur les principes de libertés et de codes ouvertes. Je penses que ce sera le cas. Elle en aurait même besoin : tout simplement, pour tous les enfants qui diront non à Google et à l'Enseignement Centralisé qu'on nous prépare. Les systèmes totalitaire (au sens de vouloir diriger la totalité de la vie humaine) précédent n'ont jamais compris l'erreur qu'ils faisaient : ils ne peuvent pas englober tous leurs citoyens, à moins de méthodes coercitives inhumaines. Global Tech est plus maligne : au lieu de combattre le communisme, elle est vend des tee-shirt de marque avec l'effigie de Mao parce que c'est cool, parce que c'est rebelle... Global Tech est le système totalitaire ultime parce qu'il est capable d'englober sa propre contestation. Mais elle est aussi fragile, parce qu'elle consentirait à nous vendre la corde avec laquelle nous souhaitons la pendre.

Tu m'as demandés si j'avais observés des cas concert et précis dans mon quotidien. En fait, je ne saurais le dénombrer. De ma mère qui fabrique ses pâtes elle-mêmes, à ce que j'ai pu voir en rapport avec Duniter et G1... oui, j'ai l’impression qu'il a une volonté de sortir de la Machine. Certes, je ne suis pas objectif. En 2011, j'étais décroissant, mes potes se foutaient de ma gueule lorsque je disais qu'un jour, on manquera peut-être de pétrole, et puis un jour j'ai vu sur la couverture d'un journal maintream le mot décroissance, et je me suis dis, c'est bon, mon travail sur cette terre est accomplie, je peux m'en aller, et puis j'ai participé aux Indignés de la Défense, et puis... enfin...  en fait ma réponse à ta question est oui. Par la force des choses, ou par convictions, j'ai vu des personnes se détourner de la Machine pour essayer d'inventer autre chose. Tous ces projets n'auront pas forcément pas d'avenir, mais je crois que ce qui compte, c'est justement d'interroger nos certitudes, histoires de voir s'ils n'y a pas d'autres possibilités plus loin. (à titre personnel, durant l'automne 2017, j'étais une larve, je n'étais plus rien, et je me suis retrouvé dans un festival de maker et j'ai vu le cuisinier se misérer pour trouver des volontaires donc je l'ai aidé, et c'est - pour faire un très gros résumé - ce qui m'a convaincu de ne pas me suicider tout de suite). Donc la réponse est oui - et j'ajouterais, oui malgré les luttes d'egos à la cons, parce que je sentais tous simplement que les gens voulaient... enfin, qu'il y avait une direction, quelque chose, même s'ils n'étaient pas d'accord sur la manière de le définir.

Tu m'avais posé deux autres questions, "que penser de cette société", et "où peut-être mener". Je pense y avoir répondu dans les premiers paragraphes.


Je ne me suis pas relu ; je penses que je réprouvais, ou au moins atténuerais certaines des choses que j'ai écrites.

Tu m'avais envoyé une lettre ouverte, et je m'étais engagé à y répondre. J'ai tenté de le faire (la carte heuristique l'attestant est encore disponible si tu le souhaite, mais j'ai préféré suivre mon intuition et ne pas trop réfléchir). J'espère que cette improvisation quand même pas mal alcoolisée saura t'apporter des réponses aux questions que tu te posais, ou confirmer (ou infirmer de juste manière) les réponses que tu as déjà trouvé.


En tout cas merci de m'avoir posé ces questions ; merci d'avoir été l'aiguillon qui m'a pousser à répondre à ces questions.

Au plaisir de te lire,

Alserweiss.








lundi 29 janvier 2018

J'ai testé pour vous : une conférence sur les cryptomonnaies dans une Hackerhouse.

J'ai testé pour vous : une conférence sur les cryptomonnaies dans une Hackerhouse.


Samedi 27 janvier, donc à la "Coloc de l'enfer", la HackerHouse d'Ivry [Insérer ici une copie d'écran d'un tweet moqueur au-dessus d'une copie d'écran d'une recherche de colocataire]. Leur réputation vient du fait qu'ils "pensent startup, vivent startup, mangent startup", et qu'ils paient 500 euros pour avoir un lit mais pas de vraies chambres.

Je voulais voir cela de mes propres yeux, et l'objet de la conférence ("Become a cyptonomad - from nomad to cryptonomad"), m'intéressait. Surtout, ce que j'y voyais, c'était une méthode pour se faire payer en cryptomonnaies et ne pas payer ses impôts, incluant donc les cryptonomads dans le spectre macronien-libérale des enflures qui disent "pourquoi je paierais la sécu ? Je suis jamais malade". Comme nous allons le voir, ce n'est pas complètement le cas.



Avant la conférence




La conférence était pleine sur Meetup, ce qui m'a obligé à prendre une place payante, les seules restante alors que j'avais eu l'impression de l'avoir déjà prise lorsque j'étais allé sur le site.

Arrivé à la HackerHouse avec une demi-heure d'avance pour pouvoir me placer correctement en cas d'affluence, j'ai découvert que la porte était fermée. J'ai alors zoné vingt minutes à Ivry, me prenant un café, avant d'y retourner.

Bien que 150 personnes avaient pris des billets, au final il a dû y avoir peut-être une trentaine de personnes, principalement des jeunes. L'un d'eux était avenant, et nous avons commencés à discutés, assis sur les chaises alignées en face de l'estrade montée pour l'occasion.

Quelqu'un a demandé pourquoi il y avait un telle engouement pour les cryptomonnaies. Peut-être que c'est parce que les gens en ont marre des monnaies fiduciaires ? Plus pragmatiquement, c'était surtout à cause de la spéculation et des promesses de gains futurs. Et ça restera certainement le cas tant que le système ne serait pas utilisé au quotidien.

J'ai discuté avec un homme qui avait vendu ses bitcoins quand le cours était à 4000 euros, et qui le regrettait. C'est clair que ça doit faire très mal.

J'ai aussi discuté avec un colocataire de la Hackerhouse d'Aubervillier, plutôt orientée dévellopeur. Les avantages qu'il y voyait à ce mode de vie, c'était de vivre avec des gens ayant la même passion que lui, et qui pouvaient l'aider dans son travail, plutôt qu'avec des colocataires qui par exemple se mettraient à faire de la musique à pas d'heures. Lorsque je lui ai dis que 500 euros pour avoir un lit et être à quatre dans une même chambre, c'était tout même cher, il me parla des avantages en terme de service, comme une femme de ménage, la possibilité d'utiliser une machine à laver.

J'ai eu l'impression que les résidents des hackerhouse voient plus ces lieux comme une auberge de jeunesse en coworking que comme une colocation, avec services intégrés.

D'ailleurs, lorsque l'une des résidentes en a parlé avant de présenter la conférence, et les a défini comme simplement "un lit, un bureau, et une bonne ambiance de travail", et que ce lieu est basé sur "le partage et l'entraide, et pousse vers le succès".

Anecdote : le paiement du loyer peut s'effectuer de la main à la main selon celui avec lequel j'ai discuté, et ils ne paient pas l'électricité puisqu'il avait voulu mettre en place une machine de mining, et que le propriétaire avait alors dit que si c'était le cas, ils allaient devoir le faire (ce qui est quand même logique).

Je n'ai pas percuté sur le moment, mais cet évocation d'un propriétaire tout-puissant, qui écrit les certificats de résidence, m'interpelle quand même. Je me demande quel doit être son business model.

Par ailleurs, à celui d'Aubervillier, le turn-over est faible : les gens restent environ un an.

Personnellement même dans mes jeunes années je doute que j'aurais pu supporter un tel mode de vie : il faut vraiment vivre pour son boulot et non bosser pour vivre pour accepter une telle existence, une sorte de hackathon permanent. J'imagine que ce n'est qu'une phase de transition pour les participants, et qu'ils ne feront pas ça toutes leurs vies.





 La conférence : Become a cryptonomad - from nomad to cryptonomad

La conférence, donc, "Become a cyptonomad - from nomad to cryptonomad", par Nicolas Wagner. Ce dernier est un ancien résident de la Hackerhouse d'Aubervillier, et travaille actuellement dans la startup Ethereum Kleros.

Cette présentation lui a été inspirée par un voyage effectuée entre fin septembre et mi-janvier aux Etats-Unis au cours duquelle sa carte de crédit avait été bloqué avant un voyage à Cancun.

Il a rapidement expliqué quelques définition : du nomade au cryptonomad : le nomade du passé s'ancre dans l'idée de pouvoir voyager, de "découvrir les countries", mais aussi de s'enrichir au niveau du dévellopement personnel. Cependant il n'était pas à l'aise avec les outils numérique, et il pouvait même y être réfractaire.

Ce n'est pas le cas du digital nomad actuel : ce dernier maîtrise le numérique et profite des avancées de la technologie pour vivre de façon confortable et bien gagner sa vie tout en restant dans sa zone de confort.

Enfin, le cryptonomad, un digital nomad crypto-enthousiaste, appartient au futur. Il est plus difficile d'être cryptonomad que digital nomad pour le moment parce que l'environnement n'est pas adapté.

Plus spécifiquement, la philosophie du nomade du passé est qu'on peut voyager quasiment sans argent ; si on n'a pas de barrière comme la peur du danger du pays, cela devient facile. Il n'y a que deux choses indispensables pour cela : un passeport, et une façon d'être, l'insight hacking (?! la capacité à s'adapter), en tout cas soigner ses interactions sociales avec les gens, pour par exemple leur taxer des euros, ce qui m'a fait penser aux "begpackers", des touristes blancs qui font la manche en Asie du Sud-Est.

Le digital nomade, maîtrise en plus les outils numériques, et reste en contact tout en se coupant d'une partie des carcans de la société : il est parfaitement possible de gérer son business avec pour seuls outils un smartphone et une connexion internet, comme l'a fait Antoine BM.

Parmi les outils qu'il utilise, il y a d'abord un sac correct (de la marque Nomatic), et des outils allant d'applications pour sélectionner le meilleur réseaux aux chargeurs solaires en passant par des cartes de crédit internationales, des VPN et la liste des hackerhouse où il pourra dormir s'il ne trouve p'Air BnB sur place.

Le cryptonomad est un digital nomad utilisant des cryptomonnaies. Il en existe de plusieurs type : le basic transforme ses cryptomonnaies en monnaies fiat, le flex peut utiliser ses cryptomonnaies et les convertis en passant par des plateformes décentralisées, mais il préfère utiliser ses cryptomonnaies directement dès qu'il le peu. Enfin, le Purist s'efforce de ne plus utiliser les monnaies fiat du tout.

Le conférencier a ensuite dressé la liste des différents outils permettant ce mode de vie, de plateformes de trading aux cartes de débits en cryptomonnaies, en passant par les hot et les cold wallet.

Il a terminé la conférence par quelques conseils pour initier une communauté dans le lieu où l'on se trouve : partir de ce qui existe sur place, que l'on peut trouver grâce à Meetup, Telegram ou des groupes Facebook, choisir le bon partenaire, être disponible pour lui, parler le plus de technologie possible, Il déconseillait par contre de parler de spéculation, ni de se lancer dans les ICO (des gens dont on ne connait pas le travail qui lèvent des millions avec des white-papers moisis, ce qui ressemble quand même la plupart du temps à du scam), et surtout de ne pas s'associer avec des entreprises.

Vinrent ensuite les questions. Le conférencier a alors donné une réponse à une question que j'attendais : l'intérêt qu'il voyait dans le cryptonomadisme était également de pouvoir voyager anonymement, de sorte que même sa banque ne sait pas où il se trouve, et justement il accorde une grande importance à sa vie privée. Il a parler aussi du fait de ne pas contribuer aux "grands groupes", comme justement les banques. C'est en voyageant ainsi que l'on se rends compte à quel point on est dépendant du système actuel.

Je lui ai posé la question de la fiscalité, il a répondu que c'était très compliqué. Il avait envisagé de faire un slide sur ce sujet mais il avait fini par abandonner. En revanche, il a déclaré tout de même être imposable en France et y payer ses impôts, même s'il est payé en Ethereum (sa déclaration d'impôt doit être un bordel sans nom).

Par ailleurs, il était également à fond pour les monnaies locale, puisque c'est bon pour l'écologie. Un des spectateur a parlé des mondes de la monnaie locale et de la cryptomonnaies, qui en fait ne se parlent pas trop, ce qui peut s'expliquer par les différences d'origines politiques entre ces deux projets.