jeudi 8 janvier 2015

Charlie Hebdo - réflexions en vrac

Réveil avec la gueule de bois ce matin après une nuit passé sur Twitter à traquer les premières informations au sujet de l’attentat de Charlie Hebdo.

J’en garde une impression mitigée. Surtout, ce qui me gène, c’est l’unanimité des réactions dans l’émotion.

J’ai toujours l’impression que lorsque c’est évident pour tout le monde, on y a pas assez réfléchit.


Les jours-qu’on-se souvient parce qu’ils sont historique


Je suis incapable de me souvenir de ce que j’ai mangé il y a deux jours, mais je me souviens avec acuité des circonstances durant lesquelles j’ai appris la collision d’un avion de ligne avec une tour du World Trade Center de New-York, le visage de ma collègue lorsqu’elle me l’annonça, ma position dans le bureau, quand bien même tous le reste de mes souvenirs de l’année 2001 s’est affaidi pour se transformer en un brouillard bienvenu vu les crises que je traversais à cette époque.

Il paraît que nous avons une mémoire spéciales pour les événements historique. N’est-ce pas étrange, une zone de la mémoire réservée à, tout au plus, une quinzaine d’évènement de cette amplitude dont peut témoigner une vie humaine ?

Ce sont des souvenirs qui s’imposent à nous, quand bien même l’événement historique vous concerne aussi peu que la victoire de la France aux Championnat du Monde de Football en 1998 (ce soir-là, je n’ai pas regardé le match, mais un film d’Almodovar sur Arte).

Il faut donc croire que la journée d’hier, avec la configuration du bureau anonyme dans laquelle j’ai appris la nouvelle de la fusillade, et le visage de mes collègues que je quitterais sans doute avant la fin de cette année pour ne jamais les revoir, va s’obstiner à vivre en moi par la grâce de cet événement.


Charlie hebdo : un journal qu’il était bien (au siècle dernier).


Une fois ma première paie acquise, Charlie Hebdo a été le premier journal que j’achetais régulièrement.

Charlie Hebdo, ce n’étaient pas seulement des caricatures et des unes caustiques, mais aussi des articles, sur l’écologie (ils parlaient même de décroissance à une époque où c’était un gros mot), les critiques littéraires de Michel Polac ou les chroniques économique de Bernard Maris, disparu hier.

Pourtant, longtemps avant l’affaire des caricatures de Mohamet, j’avais cessé de le lire : en effet j’avais constaté le virage atlantiste amorcé par Philippe Val, avec notamment ses prises de position en faveur de la deuxième guerre d’Irak - pour ne rien dire certains de ses éditoriaux, sidérant de ce que je ne pouvais pas considérer comme autre chose que de la mauvaise foi sur certains événements du Moyen-Orient.

Quant aux caricatures de Mohamet, je ne conteste pas la sincérité de leur engagement, mais je n’ai jamais pu me départir de l’impression qu’ils ont été instrumentalisé.


Un onze septembre à la française ?


Aujourd’hui, tous le monde déclare être Charlie, comme après le 11 septembre 2001 nous étions tous américains. Si cette analogie est pertinente, nous pouvons craindre le pire, lorsqu’on voit ce que sont devenus les Etats-Unis par la suite, et par extension le monde.

J’oses espérer que tous ceux qui défileront pour la liberté d’expression sauront s’en souvenir lorsqu’on nous présentera des projets de loi genre Patriot Act.

mercredi 7 janvier 2015

2014 : une rétrospective personnelle (deuxième partie)

Suite de cette rétrospective de l'année 2014.

Je me propose de faire un compte-rendu de mes découvertes et de mes évolutions personnelles durant celle-ci.

Je la diviserais en trois parties :

1 / Du journal intime à la tweet-story

2/ Des Indignés de la Défense aux Hackerspace

3/ Des investissements atypiques au Bitcoin


Des indignés de la Défense aux Hackerspace


Je poursuis cette rétrospective personnelle de l’année 2014 en me concentrant sur son aspect associatif, qui à été assez riche.

Petit retour en arrière pour commencer, en 2012 plus précisément, durant le mandat Sarkozy. J’avais été intéressé par le mouvement des Indignés à cause de sa volonté de changer les choses, et aussi pour ses principes d’organisation où les décisions se prenaient collectivement après un consensus et non un vote, au cours d’Assemblée Générale. Surtout, ce mouvement me paraissait la version IRL du principe des Anonymous (tout le monde peut en faire partie, il n’y a pas de centre, l’organisation été massivement décentralisée).

Les intentions étaient louables, mais les conditions étaient difficiles, entre les flics ne cessant de nous harceler sur le parvis de la Défense avec une violence rare (une participante, modérée devenue plus tard une amie, se souvient encore du coup de matraque républicaine qui aurait ou mettre un terme à cette modération si elle avait été plus impulsive), et le froid qui s’abattait sur le Parvis. Il faut croire que comme la misère, la Révolution est plus facile au soleil.

Sans compter les luttes d’égos internes au mouvement : les principes étaient louables sur le papier, mais dans la pratique les AG se transformaient trop souvent en pugilat lorsqu’elles ne sombraient pas dans des discussions incessantes n’aboutissant sur rien.

J’en gardais donc une impression amère, mais tout au moins celle-ci me permit de nouer des relations avec des personnes que je fréquentes toujours.

Au début de cette année, j’avais commencé à m’intéresser aux Maîtres Ignorant. La thèse de ce groupe composé d’ancien Indignés de la Défense est qu’il est possible d’apprendre des choses sans forcément avoir de professeur sachant, uniquement par le dialogue. Cette idée me laissa sceptique, aussi voulu-je voir ce qu’il en était.

* * *

La théorie des maîtres ignorants me laissa tout d’abord sceptique, mais je dois reconnaître que l’application de ces principes, s’ils ne faisaient pas de miracles, n’étaient pas dénuées de résultats. Durant ces sessions, je sentais vraiment l’émergence d’un savoir se cristallisant au sein de la discussion.

Deux sessions en particulier eurent une influence majeures sur la suite de mon année. La première était la rencontre avec une coopérative globale toulousaine s’inspirant d’une expérience barcelonnienne de communauté, la seconde la rencontre avec les membres du Loop, un hackerspace squattant une ancienne caserne parisienne.

J’appris que l’organisation de la coopérative était quelque peu différente de celle des Indignés : les décisions concernant l’organisation ne se prenaient pas après d’interminables discussions durant les AG, mais prise individuellement, et si celles-ci posaient problème on en discutait en AG. La do-icraty : celui qui fait, décide. Et on n’en discute que s’il y a objection radicale par la suite.

Le même principe était en application au Loop.

Évidemment il ne s’agissait de rien de parfait ; mais ce simple principe était plus efficace que ce que j’avais vu auparavant.

Au cours de l’année j’ai recroisé d’anciens Indignés de la Défense, qui tous était d’accord sur ce point : au lieu de s’indigner en parlant de politique, participer au mouvement des hackerspace était beaucoup plus positif pour changer la société.

Du côté de mon boulot, j’étais en intercontrat ; j’avais donc du temps, que j’espérais consacrer à une véritable étude des tiers-lieux parisiens. Le dernier en date que j’ai visité à été La Paillasse, biohackerspace au coeur de Paris.

Il y aurait de passionnantes études comparatives à faire entre ces différents lieux, leur population, leur configuration, propice à déterminer un spectre complet de ce que peuvent être ces lieux alternatifs. Ce qui sera l’objet d’un autre billet.